Compte-rendu et film

Le Larzac

Le causse du Larzac est un haut plateau karstique français du sud du Massif central qui s'étend entre Millau (Aveyron) et Lodève (Hérault).

L'ensemble (relief, architecture, occupation du sol) est assez original pour avoir incité à la création du Parc naturel régional des Grands Causses et être inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. Le site est célèbre pour avoir été le point de départ d’un mouvement de désobéissance civile dans les années 1970, la lutte du Larzac.

C'est le plus grand de tous les causses. A 800m d'altitude, ce plateau présente de nombreuses cassures, où se nichent des vallées verdoyantes côtoyant des zones plus arides. Parfois, le sol rouge argileux comme autour de La Couvertoirade permet la culture des céréales.

C'est le royaune des brebis. Pourtant nous n'en aurons vu aucune. Quand on en fera la remarque, certains s'étonneront, d'autres diront qu'elles fuient la chaleur et que l'après-midi, elle se réfugient soit dans les bergeries soit dans les bosquets. Mais il ne faisait pas si chaud, et nous avons marché le matin autant que l'après-midi. Ce que je crois, c'est qu'il en est des brebis comme des vaches, elles ne quittent pas les trayeuses électriques des bergeries. Tant pis pour le décor !

Larzac-une semaine de randos

Hôtel de la Gare aux Ânes

Cet hôtel restaurant d'une dizaine de chambres interpelle par son joli nom. C'est l'ancienne gare de Nant Comberedonde, sur la ligne Le Vigan - Saint-Affrique, reconvertie en hôtel il y a quelques années. Trois ânes ornementent le parc, justifiant l'appellation commerciale.

Avant Aujourd'hui
Gare nant ancienne Dsc 8325

La ligne ferroviaire avait été ouverte en 1896, puis fermée aux voyageurs en 1939, et aux marchandises en trois étapes de 1952 à 1971. En 1999, une petite partie a été réouverte à partir de Sainte-Eulalie-de-Cernon pour son exploitation ludique en vélo-rail

Lundi - au départ de La Couvertoirade

800px templars burningRando de 17km, 214m de dénivelé+, altitude entre 752 et 826 mètres.

Ce très vieux village entouré de murailles dépendit d'abord de l'abbaye de Nant, puis des templiers, avant de passer aux mains des hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem après la disgrâce des templiers et l'exécution du dernier grand-maître de l'ordre, Jacques de Molay, par Philippe-le-Bel en 1314 (à droite, miniature illustrant la mise à mort par le feu de Jacques de Molay). Ce sont ces derniers qui élevèrent les remparts au XVème siècle.

Cette première rando, sous le soleil, est une parfaite initiation au pays caussenard. De grands espaces mi-désertiques, quelques champs cultivés, des bosquets et des bois, une vue au loin le plus souvent.

Mais le fait marquant de cette journée sera la chute de Michèle, cause d'une entorse de la cheville. Elle finira la randonnée, mais le lendemain la cheville sera enflée, bleue et bien sûr douloureuse, imposant le retour à Versailles le lendemain mercredi. Regrets, regrets !

Après le verre de post rando à La Couvertoirade, nous irons à la pharmacie à St Jean-du-Bruel. Ce sera l'occasion d'une première visite de cette petite cité cévenole, que nous traverserons jeudi à l'occasion de la rando au départ de Nant.

 

Mardi - au départ de Sainte-Eulalie-de-Cernon

Météo pluvieuse annoncée pour ce deuxième jour. Effectivement, il pleut ce matin, et la cheville de Michèle ne lui permet pas d'envisager de randonner.

Aussi décidons-nous d'aller visiter l'abbaye de Sylvanès, à une quarantaine de kilomètres au sud-ouest de l'hôtel. Nous reviendrons pique-niquer à l'hôtel, puis ferons la rando prévue, il ne pleut plus, réduits malheureusement au nombre de trois.

L'abbaye cistertienne de Sylvanès a été fondée en 1136 par Pons de l'Héras, noble brigand ripailleur repenti. Elle rayonnera un siècle et demi, déclinera, puis abandonnée, sera en partie démolie à la révolution. Il reste l'église abbatiale, la plus large église romane de France, un pan du cloître, la salle capitulaire et le scriptorium. A usage agricole ces derniers siècles, les bâtiments ont été magnifiquement restaurés par le père dominicain et compositeur André Gouzes et l'actuel directeur Michel Wolkowitsky. C'est aujourd'hui un centre de culture, d'art et de spiritualité proposant stages, colloques et conférences. Chaque été, l'église accueille le Festival International de Musiques Sacrées.

Rando au départ de Ste Eulalie-de-Cernon - 15km, dénivelé+ 549m, alt entre 570m et 835m.

Les templiers ont établi à Ste Eulalie une importante commanderie dans le but de mener l'organisation du Temple sur le Larzac. Elle devient une des plus puissantes commanderies templières du sud de la France, finançant les activités des templiers en Palestine.

Après la chute de l'Ordre, la ville passe sous domination de l'Ordre de Saint-Jean (futur Ordre de Malte). La ville a été fortifiée au XVème siècle, quelques décennies après le pillage de la ville et l'incendie du château par un seigneur voisin. 

La rando commence par une forte montée dans un chemin pas trop facile. 300 m de dénivelé, en deux kilomètres environ. Au sommet, le brouillard qu'on n'avait pas encore vu ôte toute visibilité. A peine devinons-nous la présence de l'antenne téléphonique. Mais en quelques secondes, la brûme se dissipe, et soleil et nuages éclairent le plateau. La descente offre de belles vues sur la cité. La deuxième boucle nous permet de longer le Cernon et de voir le dolmen des Rafènes à proximité du hameau La Baraque.

Mercredi - au départ du Viala-du-Pas-de-Jaux

Rando de 20 km, dénivelé + 457m, alt entre 538m et 847m.

Jour de départ de Michèle, que nous laissons, seule et désolée, à l'arrêt de car de La Cavalerie, qui la mènera à Montpellier pour un retour presque direct sur Paris. 

Viala-du-Pas-de-Jaux est aussi une cité templière, puisque les templiers l'acquirent par donation en 1150. La commanderie est alors rattachée à Sainte-Eulalie. L'église est construite en 1315, et la tour grenier, qu'on voit encore, est érigée au début du XVème siècle en protection des pillards.

La rando commence par une belle marche sur le plateau, domaine supposé des brebis, protégé par des barbelés et des barrières. Mais de brebis, point guère, comme dans tout le séjour.

Au bout du plateau, grand spectacle, c'est le cirque de Tournemire. "Grandiose" s'esclafferont mes deux acolytes ! Quelques vautours se régaleront du paysage, à défaut d'autres choses, tout comme nous qui affolerons nos appareils photo.
En longeant le cirque, on arrive à la Croix de Gréponac, panorama toujours sublime.

Jolie descente vers Viala pour terminer la première boucle. Nous profitons de la générosité de dame nature pour avaler une ventrée de mûres en guise d'apéritif. Nous verrons aussi notre deuxième lavogne, réservoir d'eau fabriqué par les hommes pour palier l'absence de cours d'eau, en recueillant les eaux de pluie pour abreuver les animaux.

 

Marche vers le sud après le pique-nique à Viala, dans un paysage typique du Larzac. A mi-parcours, notre attention est attirée par le lavogne de La Vialette, puis la maison de même nom, planquée derrière les bois. Si tant est que nous ratons la bifurcation, ce dont on se rend compte au bout de 2km. Cette erreur nous a menés à l'extrêmité du plateau, survolant un cirque pas loin d'être aussi spectaculaire que celui de Tournemire. Conclusion, il ne faut pas craindre de se tromper !

 

 

Jeudi - au départ de Nant

Rando de 20 km - dénivelé 631m, alt entre 481m et 844m.

Ce fut la rando la plus dure de la semaine, avec deux parties montantes assez rudes.

Au départ de Nant, on traverse la Dourbie, puis on monte avec le roc Nantais (ci-dessous à gauche) en ligne de mire. Mais on oblique vite vers l'est, pour grimper jusqu'au rocher de l'oeil de Boeuf. Nous avons vu l'endroit, mais pas le rocher, et avons un peu pataugé pour trouver le bon chemin. Le balisage comme souvent est très aléatoire, d'autant plus que le PR débouche sur un champ !

La descente est bien méritée, très belle. A quelques kiolmètres de St Jean-du-Bruel, sur un petit chemin de terre, nous tombons sur cinq anciens fours à calamines, qui servaient à  l'extraction du zinc. Difficile d'imaginer qu'il y avait en cet endroit difficilement accessible une activité minière! 

St Jean-du-Bruel a été jadis un village actif sur le bord de la Dourbie. Son vieux pont ne sert plus guère qu'aux randonneurs, les autos passant sur le pont neuf bien moins esthétique. Nous déjeunerons au bord de l'eau sur un espace aménagé pour le pique-nique, au pied d'un ancien moulin. Joël se plaindra d'une drôle d'odeur, qu'on définira mieux quand nous verrons en partant que cet espace est aussi, voire surtout, fréquenté par les promeneurs de chiens !!

Frugal repas avalé, c'est reparti pour le deuxième montée de la journée, qui sera tout aussi rude. Elle aboutit au village d'Algues, que surmontent les ruines du château-fort détruit par Richelieu en 1629. Il ne reste plus qu'à lentement redescendre vers Nant, où nous attendent patiemment trois rafraîchissantes bières blanches.

Vendredi - au départ de La Cavalerie

Rando de 15 km - dénivelé 143m, alt entre 778m et 842m.

Rando paisible qui nous aura permis d'approcher la partie militaire du plateau du Larzac qui a défrayé la chronique dans les années 70. Toujours pas de moutons, pourtant il y a barrières et barbelés. Le terrain est sec et pauvre, l'horizon dégagé, bordé par des monts plus élevés, on pense au désert.

On ne fera pas un scoop en disant que La Cavalerie est encore une cité templière, camouflée derrière de hauts remparts. Moins authentique que La Couvertoirade ou Ste Eulalie, elle conserve son charme par quelques restaurations réussies.

Après la rando, nous pousserons (en voiture) à l'ouest jusqu'à Roquefort pour visiter la cave Gabriel Coulet. Sept producteurs de roquefort se partagent un marché un peu déclinant, Coulet est le quatrième en importance derrière Société et Papillon. Soulignons que ce bon Gabriel Coulet, dont la troisième ou quatrième génération tient les manettes, est fournisseur de l'Elysée. Pas moins !

Nous en dégusterons un peu, dont un très ancien, très bon mais à manger avec modération, et surtout en achèterons.

Pour le verre traditionnel de fin de journée (avant celui de l'apéro), nous nous arrêterons à La Couvertoirade, cité magique, et boirons la meilleure bière de la semaine, une délicate bière blanche de la région, très agréablement citronée. Dur dur, le métier de randonneur !

Ainsi se sont terminés les cinq jours prévus de randonnées, nous aurons marché plus de cent kilomètres, alors demain samedi est une journée de tourisme.

samedi touristique - Cantobre, Saint-Véran, chaos de Montpellier-le-Vieux, Millau

A quelques kilomètres au nord de Nant, Cantobre est un tout petit village perché sur la falaise. Son château a été rasé par Richelieu, spécialiste du genre. Après la porte de la ville, des ruelles abruptes mènent à la charmante église Saint-Etienne, avec sa porte à volet comme dans une maison paysanne. 

Un peu plus au nord, Saint-Véran est un village littéralement accroché à la montagne, accessible par une petite roude hasardeuse. L'église est construite en contre-bas, dans la vallée.

Encore plus au nord, le village de La Roque Sainte-Marguerite s'étage sur une colline. Tout en haut, l'église et une tour à mâchicoulis, vestige du château du XVIIème siècle.

Un peu avant le village, le moulin du Corp avec son vieux pont qui franchit la Dourbie, est impressionnant.

Il nous a fallu ensuite de l'obstinantion pour atteindre la ferme-auberge indiquée près de Montepellier-le-Vieux. Le chemin de terre qui y menait était interminable, mais la récompense fut au bout. Dans un cadre idyllique sur le causse noir, toujours sans mouton, une vieille ferme et un solide déjeuner : charcuterie, tarte à la tomate, agneau, fromage et dessert, arrosé par un bien bon Faugères.

Sur un promontoir escarpé du causse noir, des milliers de roches étrangement déchiquetées dégringolent des pentes abruptes. C'est le chaos de Montpellier-le-Vieux. Effet saisissant ! On peut y marcher par des sentiers balisés, ou quand on manque de courage et/ou de temps, s'y balader en petit train. C'est ce que nous avons fait.

C'est en se retirant que la mer a laissé, il y a quelques centaines de millions d'années, des sédiments qui ont fait cette forêt de rochers, aux formes surprenantes sujettes à toutes les interprétations.

Il y a bien longtemps, quand les bergers du sud de Montpellier venaient ici pour la tranhumance, cet ensemble de rochers faisait penser à une ville. Ils l'appelèrent Montpellier-le-Vieux, pour la distinguer de la vraie ville de Montpellier devant laquelle ils passaient en premier.

Il nous restera trop peu de temps à consacrer à Millau, qui en aurait mérité davantage. Quelques pas quand même dans le centre historique, juste ce qu'il faut pour humer l'air d'une ville bien typée sud, et très animée en cette belle soirée de samedi soir.

Dimanche - c'est le retour

La semaine a été bien remplie, le temps très agréable (on oublie le mardi matin), les marches belles et parfois plus peu physiques que l'image qu'on pouvait avoir d'un Larzac plat, les sites visités magnifiques. Pour qui s'intéresse à l'histoire des chevaliers templiers et hospitaliers, c'est l'illustration des livres. 

Pour nos amis de Millau, rencontrés en Ethiopie, le causse du Larzac est peut-être le moins beau des causses, préférant le causse Méjean, le causse noir, ou le plateau de Lévézou, patrie de Denis, remarquable avec ses cinq grands lacs.

Pour une autre fois peut-être.

Dsc 8327

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