De Dehli à Jodhpur

De Dehli à Mandawa

P 20180226 105259Beau ciel bleu, température estivale, départ à l'aube vers la province du Shekhawati et sa capitale, Mandawa. Une première halte dans une petite ville dont je n'ai pas retenu le nom, permet une première sensibilisation à l'ambiance des villes indiennes: une passion des indiens pour le klaxon qui rend assourdissante la promenade en ville, une circulation folle, des couleurs vives, de la pauvreté voire de la misère, des "auto-collants" en permanence, prompts à nous vendre cartes postales, souvenirs et autres babioles, des vaches partout, sur la route, assises, debout ou en balade, dans la ville ou dans la campagne, sur les autoroutes aussi, des gens aimables et souriants, acceptant volontiers qu'on les prenne en photo. Cette première balade d'une trentaine de minutes nous aura permis un premier plongeon dans un monde qui tranche brutalement avec nos sociétés aseptisées.

Plus tard, nous croisons sur la route des pélerins, colorés et joyeux, allant à pied au temple dédié au dieu vénéré. Ils vont seuls P 20180226 111422ou en groupe, souvent accompagnés de musique, avec le drapeau de leur temple. 

Très vite, nous remarquons la façon très personnelle de conduire des indiens. Je n'ai pas réussi à savoir si un permis de conduire ètait nécessaire pour s'aventurer sur les routes. Toujours est-il qu'on roule un peu n'importe où, qu'on klaxonne à tout bout de champ, manière de dire bonjour, qu'on double là où il y a de la place, qu'on roule sur l'autoroute dans la file qui nous fait plaisir, pourquoi pas même à contre-sens, les feux tricolores sont économisés car bien peu souvent respectés. Ce qui fait dire à nore guide que pour conduire, il faut trois qualités: des bons freins, un bon klaxon et de la chance. J'ajouterai du culot.

Quand nous aurons vu, à côté du restaurant de notre premier déjeuner indien, un temple dédié au dieu singe, immense statue multicolore perchée sur un monticule, et que ne renierait pas Disney, on aura eu en une matinée un aperçu de ce qui allait marquer tout notre séjour. 

Nous verrons le long de la route un certain nombre de briquetteries. Le tavail y est largement manuel, et les femmes y ont le "beau rôle". Une femme peut façonner 500 briques par jour, payées une roupie par brique. Elle peut donc espérer 500 roupies par jour, soit un peu plus de six euros, pour 8 ou 9 heures de travail, accroupie, en plein soleil.
Le salaire mensuel moyen en Inde est de 130 dollars, on y est donc. Ragou, notre guide, m'a semblé parler d'un salaire minimum de 3 à 400 euros. On en est loin.

60% de la population vit à la campagne. Le poids des traditions y est très fort. Aussi la scolarisation y est-elle plus faible qu'en ville, les mariages entre castes rares, le nombre d'enfants par familles important, 6 à 7, contre 2 en ville.

Mandawa est célèbre par ses havelis, belles demeures, parfois palais, construites par de riches commerçants du XVIIIème s. au début du XXème. Dans ces bourgs cernés par les dunes de sable mais situés sur la route de la soie, de riches marchands ont bâti des fortunes grâce au commerce caravanier. Pour afficher leur puissance, les havelis se disputaient en taille et richesse des décorations. Des fresques intérieures et extérieures ornaient toutes ces maisons, et devaient donner à la ville un aspect magnifique, qu'elle n'a plus aujourd'hui. En effet, l'apparition du chemin de fer à sonné la fin du commerce caravannier, et nos riches marchands ont quitté Mandawa pour suivre les nouveaux centres de commerce.
Si quelque havelis font encore bonne figure parce qu'ils ont été aménagés en hôtel, la plupart sont en voie de délabrement avancé, et malgré la beauté des fresques subsistantes et des constructions, un effort est nécessaire pour imaginer ce que devait être la ville il y a un siècle. Mandawa a besoin d'un Malraux, mais est-ce vraiment la priorité du moment?

De Mandawa à Bikaner

P 20180227 090757A une trentaine de kilomètres de Mandawa, Fatehpur rassemble aussi une vingtaine d'havelis, en situation périlleuse comme à Mandawa. Il semblerait que la ville abrite le haveli "vedette" de la province du Shekhawati, le "Nadine Haveli", du nom de l'artiste peintre français Nadine Leprince, qui en a fait l'acquisition et l'a splendidement restauré en 1999. On se consolera de ne pas l'avoir visité en allant sur le lien youtube qui nous la présente.

Si le paysage est aride, le desert du Thar n'est pas loin, élevage et culture sont bien présents. Un arrêt non prévu dans une ferme nous fait découvrir la vie d'une famille ordinaire de paysans. Pour l'anecdote, l'arrivée de 25 touristes armés d'appareils photos et de bons sentiments a causé une grande frayeur à une jeune vache, qui a arraché le piquet auquel elle était attachée, pour s'enfuir sur la route en toute insouciance. Tout est bien qui finit bien, les deux jeunes qui ont tenté de la ramener au port ont affirmé après avoir échoué à la ramener, qu'elle rentrerait gentiment à la maison.

P 20180227 122916Plus tard nous nous arrêtons pour voir un temple dédié au dieu singe. On est bien loin évidemment du charme de nos églises romanes de campagne, et ces immenses statues colorées nous font plus spontanément penser à Dysneyland qu'aux abbayes cisterciennes. 
Il faudrait plus de dix jours pour comprendre l'hindouisme, qui serait selon notre guide la plus vieille religion du monde, mais qui serait aussi le rassemblement de milliers de sectes et croyances, expliquant que l'hindouisme d'aujourd'hui comprend plus de trente millions de dieux. Chaque vache les intègre tous, ce qui fait de ces animaux des bêtes sacrées.

Bikaner est une grande ville de 2 millions d'habitants fondée au 15ème siècle.
Le palais du maharaja est comme partout un point phare de visite. Depuis Indira Gandhi, les maharajas ont été déssaisis de leurs pouvoirs, leurs palais ont été souvent nationalisés, en tout ou en partie. Mais soyons rassurés, ils restent dans une confortable aisance financière, et ne doutons pas que les banques suisses leur doivent une bonne part de leur success story.
Un palais de maharaja, c'est grand, très grand même, ça comprend des cours avec jardins, fontaines, trônes, des fresques et stucs à foison, des appartements royaux mais aussi pour les femmes, nombreuses, qu'un bon maharaj se doit d'avoir. Les feuilles d'or s'étalent sur les murs, le marbre y est plus fréquent que la pierre. Etaler sa richesse est signe de pouvoir, tant vis à vis des puissances externes que du bon peuple pressuré pour le bon plaisir du maître. Bien sûr ça n'est pas propre à l'Inde.

Donc Junagarh Fort est un beau palais, très beau même. Sa construction débuta en 1589, mais des agrandissements furent apportés jusqu'en 1937. Ce palais auquel on accède par une série de portes fortifiées, fut une citadelle imprenable. Sur une porte, on peut voir des empreintes de mains commémorant d'anciennes sati, en mémoire des épouses royales contraintes à s'immoler sur le bûcher en même temps que leur maharaja de mari était incinéré. Les portes sont aussi renforcées par d'énormes pointes en fer, qui visaient à empêcher de recourir aux éléphants pour les défoncer.

P 20180227 174951Bikaner, c'est aussi un marché très vivant, des ruelles encombrées, des marchands partout. Une animation folle, une villle trépidente, à l'image de toutes les autres, auxquelles il faut s'acclimater quand on est habitué à la quiétude ... francilienne!

Nous finirons l'après-midi par un salut aux maharajas de Bikaner, qui bien qu'incinérés, bénéficient de mausolées en marbre blanc pour que leur mémoire continue à traverser les générations. Et tout à côté, Ragou nous a concocté la surprise du jour, en nous proposant une dégustation de deux fabrications locales, rhum et whisky, indiens bien évidemment, accompagnés de coca, eh oui, et de lentilles grillées! Un très agréable moment. 

De Bikaner à Jodhpur

La première visite de la journée sera une curiosité religieuse. A Deshnoke, 35 km au sud de Bikaner, existe le temple de Karni Mata, dit aussi le temple des rats. Ceux-ci sont sacrés, cela va sans dire, et se baladent en masse et en pleine liberté dans le temple. Il y en aurait 25000 selon wikipedia, tant dans le temple même que dans la cour. Ils y ont des écuelles de lait et de grain, et la foi n'ayant pas de limite, ils participent aux repas que certains pélerins font dans le temple, avec leur famille. Pour nous occidentaux agnostiques et rationalistes, c'est un spectacle curieux et peu ragoutant, et marcher en chaussettes recouvertes d'un voile gracieusement fourni n'est pas particulièrement affriolant. Il aurait fallu un peu plus de pratique et de conviction pour aller pieds nus, comme les hindouistes. Certains d'entre nous en sont ressortis dégoûtés, mais fiers d'avoir vaincu leur peur, d'autres amusés, mais la religion hindouiste n'en est guère sortie grandie.

Encore quelques kilomètes, et nous voilà dans une autre curiosité, une immense clinique vétérinaire, pour tous animaux, mais sutout pour vaches. Ces braves bêtes cornues étant sacrées, il est interdit de les tuer, même malades, même blessées. 80% des vaches indiennes sont des animaux d'élevage, pour le lait et le beurre. 20% des bêtes, celles qu'on voit dans les villes, sur les routes et autoroutes, sont abandonnées. Elles peuvent être victimes de maladie ou d'accidents de voitures, la clinique les ramasse alors bénévolement pour les soigner et leur rendre leur liberté quand c'est possible, leur assurer une fin "paisible" dans le cas contraire. C'est la cour des miracles des vaches, où on voit des animaux estropiés, suspendus, malades avec des tumeurs pustulantes. On regrette le temple des rats!
Mais si on veut faire un bon karma, alors on achète de l'herbe à l'entrée de la clinique, et on la distribue généreusement et injustement aux vaches qui accrochent notre regard. Quelques roupies à la sortie, et c'est un pas de plus vers la sortie du système de réincarnation.


 

Jodhpur

On arrive à Jodhpur l'après-midi. Cette ville fondée en 1459, est la deuxième ville du Rajasthan avec un peu plus d'un million d'habitants. Elle est dominée par le plus imposant fort du pays, Mehrangarh, "citadelle du Soleil" des Rathores qui croyaient en descendre. Elle domine la ville bleue, de la couleur du ciel choisie par les brahmanes pour colorer leurs maisons.

Avant d'arriver au palais, halte à Jaswant Thada, imposant mausolée blanc construit en 1895, et où fut incinéré le maharaja de Jodhpur, Jaswant Singh II.

La ville présente d'autres attraits, notamment le Sardar Bazar, un marché grouillant de vie. Cette large esplanade est le centre du commerce dans la vieille ville. Dominée par la masse spectaculaire de la forteresse, elle a été gratifiée par le souverain Sardar Singh (1895-1911) d'une horloge monumentale, la Clock Tower.

Du palais, on sera descendu par une course folle en touc-touc, petit véhicule à trois roues qui demande la même inconscience que la conduite automobile! Voir ici le film de 11' de Bernard P. 

Les castes - un système bien vivant.
Quatres castes constituent le système: les brahmanes, les guerriers, les commerçants, les intouchables. A elles, s'ajoutent 25000 sous-castes. Si le système s'assouplit dans les villes, il reste bien vivace dans les campagnes. La caste n'est pas liée au métier, l'hérédité prévaut. On peut être brahmane sans être prêtre, et on a vu un Premier Ministre appartenir à la caste des intouchables. On ne se marie pas en dehors de la caste, ni à l'intérieur d'une même sous-caste.

Les films

Diaporama musical et légendé

Les films de Bernard P.

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